mardi 15 décembre 2009

ARGENT ET CALCULS ECONOMIQUES MINENT LA CONFERENCE DE COPENHAGUE





Pas d'argent, pas d’accord, a dit Sergio Serra, l’ambassadeur climat du Brésil à Copenhague. A son tour le vice-ministre des Affaires étrangères de la chine de déclarer que c'est relativement facile pour les pays développés de présenter des chiffres pour le court terme. Mais qu’en sera-t-il sur le long terme ? Pourquoi ne s’engageraient ils pas financièrement jusqu'à 2050 ? De tels propos n’augurent rien de bon pour les négociations de la conférence de Copenhague. Ils sapent par conséquent tout effort pour l’aboutissement d'un accord sur le climat.


L’union européenne semble avoir bien compris l’enjeu. Elle va à la conférence de Copenhague avec une aide de 7,2 milliards d’euros sur trois ans pour les pays les plus pauvres afin de leur permettre de faire face aux conséquences du réchauffement climatique. Une somme considérée comme insignifiante par le porte-parole du groupe des 77 (qui regroupe tous les pays en développement), qui ajoute que cette initiative nourrit encore plus la défiance sur les intentions des leaders de l'Union européenne à l'égard du changement climatique. Plus grave encore, il les accuse de sceptiques aux changements climatiques.

Depuis Kyoto, toutes les négociations sur la lutte contre les changements climatiques, qu’elles soient relatives aux efforts de réduction des GES, ou d’adaptation, se sont butées sur le problème des financements, qui ont constitué une pierre d’achoppement à la réalisation de résultats palpables, et bien que cette question était toujours au cœur des débats, elle n’a jamais était abordée d’une manière approfondie, encore moins consensuelle. En effet, l’une des causes de l’échec du Protocole de Kyoto, si on exclue sa non-ratification par les Etats-Unis, demeure incontestablement la question financière, qui est restée dans le stade des promesses et des bonnes intentions, et qui de plus a constitué le point de discorde entre pays développés d’une part et pays en développement et pays pauvres d’autre part.

Les uns et les autres se rejettent la responsabilité. Les pays développés considèrent que certains pays émergents de la « non annexe I » sont aussi responsables de la dégradation de l’environnement mondial, et que par conséquent, ils sont dans l’obligation de mettre la main à la poche. Ils craignent aussi de voir l’argent réservé à cet effet, notamment celui destiné aux pays pauvres, utilisé à d’autres fins, voire même détourné en l’absence de mécanismes de contrôle et d’évaluation, ce qui les laissent hésitants et sceptiques sur ce point.

Les pays en développement, brandissent la carte de la responsabilité historique des premiers, et leur devoir de payer pour les dommages qu’ils ont causé à l’environnement un siècle durant, et qui devront se chiffrer à pas moins de 150 milliards de dollars par an. C’est ce qui se dégage des négociations actuelles du cop15.

Chose tout à fait absurde dans la mesure où le fonds d’adaptation prévu par le Protocole de Kyoto, créé en 2001 en vue d’aider les pays les plus vulnérables à supporter les effets des changements climatiques, et qui après moult péripéties sur son mode de gestion n’a pu récolter que la modique somme de 300 millions de dollars alors que ses initiateurs ont tablé sur plus de 500 milliards entre 2008 et 2012.

Les deux autres fonds d’investissements climatiques (le Fonds pour les technologies propres, et le Fonds stratégique pour le climat) créés nouvellement pour assurer le financement supplémentaire de soutien aux efforts des pays en développement en matière d’atténuation et d’adaptation ont tablé sur cinq milliards de dollars.

Les négociations sur les changements climatiques devant aboutir à un accord global ne seraient-elles pas en train de devenir une sorte d’accords de Bretton Woods bis ? Lesquels accords ont dessiné les grandes lignes du système financier international après la Seconde Guerre mondiale, et ont permis la mise en place d’une organisation monétaire mondiale ayant favorisé la reconstruction et le développement économique des pays touchés par la guerre.

La prédominance de la question financière à la conférence de Copenhague et dans toutes les conférences qui l’ont précédé donne l’impression que le monde débat de la crise financière et non de la crise environnementale. C'est pour le moment le principal sujet de discorde entre les deux camps, et tant que leurs positions ne convergeront pas, aucun accord ne sera conclu.

Ce qui est vraiment désolant dans cette conférence et qui se fait au détriment de l’environnement, c'est cette guerre de leadership, qui ne dit pas son nom et qui est en train de se dessiner entre les différents protagonistes, et même au sein du même groupe, sur fonds du soit disant financement de la lutte contre les changements climatiques. Elle cache en réalité des désaccords Nord-Sud qui dépassent la question du climat. En effet, les pays en développement, voulant rattraper le retard accumulé, réclament la pénalisation des pays développés, en leur exigeant de prendre en charge à eux seuls tous les frais découlant de la mise en place des mécanismes de lutte, et de payer en sus, des dédommagements aux pays les plus vulnérables. Pour leur part, les pays producteurs de pétrole craignent l’établissement de barrières sur le marché des hydrocarbures, à l’exemple des taxes prévues sur ces produits, qui les priveraient de liquidités susceptibles de booster leurs économies.

De leurs cotés, les payés les plus avancés accusent certains pays émergents, notamment le BRIC (Brésil, Rusie, Inde, Chine), dont l’expansion économique fulgurante commence à les inquiéter, et à les bousculer au sein même de leurs zones d’influence héritées de la période coloniale et de la guerre froide, de vouloir bâtir leur développement au dépens de l’environnement. En les poussant à participer au même titre qu’eux aux efforts de lutte contre les conséquences du réchauffement climatiques, ils estiment que les pays producteurs de pétrole (généralement des pays du Sud) doivent reverser une partie des grands profits qu’ils réalisent suite à la hausse des prix du pétrole de ces dernières années pour la protection de l’environnement.

L’UE considère pour sa part que le besoin de justice entre les nations suppose un partage du fardeau de l'environnement.

Pour leur part, les puissants lobbies pétroliers et industriels, notamment ceux des USA, avec leurs slogans du genre « notre prospérité dépend de nos émissions de CO2 » ou « plus de CO2 pour une terre plus verte », vont peser de tout leur poids sur les négociations. Et sachant le poids des Etats-Unis lors de la conférence, ils ont déjà dépensé des centaines de millions de dollars pour que le sénat amende le texte de la loi sur le climat afin d’infléchir la position des négociateurs américains au cop15.

Même le célébrissime milliardaire américain George Soros s’est fait inviter à Copenhague pour proposer une idée tout à fait originale : la création d’un fonds climat doté d’une enveloppe de 100 milliards de dollars. L’originalité de son idée réside dans le fait que cet argent ne proviendrait pas des budgets des Etats, mais plutôt du fonds monétaire international, et plus précisément des droits de tirage spéciaux (DTS), que le FMI distribue à ses membres, et dont une grande partie va aux pays les plus riches. Il propose que ces pays alimentent le fonds climat pour l’équivalent de 100 milliards de dollars en DTS sur 25 ans.

Au vu de toutes ces considérations, peut-on espérer à la conclusion d’un accord cadre, qui serait au dessus des calculs économiques et financiers et des comptes pertes et profits des différents protagonistes ?

En l’état actuel des choses, ca ne présage rien de bon pour le climat, mais reste tout de même à espérer. Que le vœu de ces milliards de citoyens sans voix, qui n’aspirent qu’à vivre dans un environnement sain, loin de tous calculs, soit exaucé, et ce par la volonté de ceux qui croient vraiment que nous n’avons pas de planète de rechange, si le pire devait arriver.

chaalal moulay.publié in http://www.developpementdurable.com/politique/2009/12/U148/argent-et-calculs-economiques-minent-la-conference-de-copenhague.html
le 15 decembre 2009

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